Le projet HEALTHI-2 vise à développer et transférer une stratégie de biocontrôle de type “push-pull” contre le thrips, basée sur l’utilisation de médiateurs chimiques.
Cette foire aux questions fait suite au webinaire du mardi 20 mai 2025 consacré au projet HEALTHI-2, porté par plusieurs partenaires du secteur horticole et de la recherche appliquée. Elle rassemble les principales questions posées par les participants du webinaire et les réponses des intervenants, afin d’aider les producteurs et acteurs techniques à mieux comprendre et appliquer les enseignements du projet HEALTHI-2.
Comprendre le comportement du thrips
Avez-vous pu confirmer que F. occidentalis était bien piégé et non pas d'autres espèces ?
Des prélèvements de thrips sont réalisés dans nos élevages, en début et fin d’essai puis envoyés à l’ANSES de Montpellier pour s’assurer que c’est le cas. Dans les premiers essais réalisés chez les producteurs, c’est toujours la 1e chose que l’on fait. Dans les cultures ornementales depuis le début du projet, environ 75 % de la population de thrips est du F. occidentalis, 15 % du Thrips tabaci qui sont les deux espèces majoritaires. D’autres espèces sont parois retrouvées comme Frankliniella intonsa, Thrips nigropilosus, Thrips parvispinnus, Thrips setosus, Hercinothrips femoralis. Une question importante dans notre cas de figure réside dans la préférence alimentaire car les thrips des ‘feuilles’ ne sont pas attirés par les mêmes odeurs.
Avez-vous remarqué des étages foliaires plus appréciés par les thrips ?
En culture de poivrons, nous n'avons pas vu d'effet de l'étage foliaire. En revanche, on observe une forte différence entre fleur et feuille avec beaucoup plus de thrips dans les fleurs. En culture de verveine, pas d’effet de ce type non plus. En revanche, la localisation des dégâts, vieilles feuilles, jeunes pousses ou fleurs, nous renseigne sur le type d’infestation (primo-infection, population en cours de contrôle, ou dispersion de l’espèce).
A quel niveau placez-vous les bandes engluées par rapport aux plantes dans les plantes maraichères ?
Les bandes engluées en culture sont disposées au-dessus des plantes puis remontée au fur et à mesure de la croissance de la plante. En culture de verveine les bandes sont disposées à 10 m de distance pour correspondre à la dose de 10 bandes de 100 m /ha.
Quelle est la distance entre les pièges et quelle est la densité de répulsif ?
Les répulsifs sont disposés au centre de le culture à la dose de 1800 diffuseurs/ha. Dans une grande surface de production, c’est un répulsif tous les 10 m. En verveine, dans nos compartiments de 100 m² les attractifs et répulsifs sont espacés de 5 m.
Combiner les stratégies de lutte
Est-ce que l'utilisation du répulsif seul pourrait être intéressante ?
Cela ne parait pas pertinent. Il faut à minima un piège (la bande engluée ici) et un attractif pour détourner le thrips de la culture. Des études montrent qu’utiliser attractif sur une bande engluée permettent dans tous les cas d’augmenter le piégeage des adultes d’un facteur 2 à 4.
Pourquoi avoir utilisé l’acarien prédateur A.swirskii et non pas T. montdorensis plus actif sur thrips et moins couteux ? Avez-vous testé d'autres acariens prédateurs au coût moins élevé que le A. swirskii ?
Lors d'essais précédents au CTIFL en culture de fraise, A. swirskii était plus efficace que T. montdorensis. Nous sommes repartis de cette expérience. L’idée était surtout de repartir de la pratique du producteur en comparant avec et sans acarien auxiliaire. Mais effectivement les notions de cout sont à moduler en fonction de l’acarien, du conditionnement et de la dose utilisée.
Quid de l'utilisation d'une punaise prédatrice ?Quel a été l'impact sur l'efficacité de la méthode ?
Nous avons eu naturellement des Orius et des Macrolophus présents lors d’un de nos essais. Ils ont probablement aidé au contrôle du thrips mais présent dans les mêmes proportions dans les 3 modalités, on voit que la stratégie push-pull a été complémentaire. A minima on peut dire que les médiateurs utilisés n’ont pas impacté le développement des punaises.
Avez-vous testé cette stratégie combinée avec Beauveria bassiana ou autre champignon entomopathogène ? Est-ce que le levier des habitats, travaillés pour les acariens prédateurs dans d'autres projets, a ou sera combiné à ces techniques ?
Ce projet est avant tout centré sur les médiateurs pour mieux comprendre comment les utiliser. Les résultats les plus encourageants pourront être déployés dans des observatoires pilotés des réseaux DEPHY EXPE et DEPHY Ferme. Toutefois, on sait qu’une approche combinée sera forcément plus efficace.
Application dans différents systèmes de culture
La méthode fonctionne-t-elle sous abri ouvert ?
Oui. Des essais ont montré une réduction de 65 % des larves de cécidomyie en myrtille sous abri partiellement ouvert, avec des bandes engluées blanches et le même répulsif.
La méthode peut-elle être utilisée en plein air (verger, champ) ?
Oui, à condition d’adapter la formulation pour tenir compte de la volatilité du produit et des conditions extérieures (ex. formulation en granulés comme pour le biocontrôle des pucerons).
Est-elle adaptée aux cultures denses comme la rose ?
C’est plus difficile : les odeurs des fleurs peuvent concurrencer les attractifs. Il faut que les diffuseurs soient plus attractifs que la culture elle-même.
Peut-on utiliser des plantes répulsives ou attractives ?
Oui, mais leur mise en œuvre est complexe : elles prennent de la place et n’émettent pas toujours les bons composés en continu. En revanche, des plantes pièges comme l’œillet d’Inde (Tagetes patula nana) peuvent être placées en bordure pour attirer les thrips.
Médiateurs chimiques
Quels produits attractifs ou répulsifs sont disponibles ?
Les produits disponibles sur le marché français sont principalement des attractifs :
- Phéromones d’agrégation (néryl (S)-2-méthylbutanoate) – efficaces pour F. occidentalis.
- Mimétiques d’odeurs florales : à base de méthyl-salicylate, anisaldéhyde + verbénone, ou nérol – attirent les espèces floricoles.
- Les formulations récentes permettent une diffusion prolongée (6 à 8 semaines).
Ces produits sont-ils homologués pour un usage public (jardinerie) ?
Les médiateurs respectant les critères du biocontrôle peuvent faire l’objet d’une AMM simplifiée, comme les autres produits de biocontrôle. La réglementation sur les répulsifs reste à préciser.
Liens et ressources utiles
- Projet HEALTHI-2
- Stratégie "Push & Pull"
- Replay du webinaire
- Poster d’identification des thrips (AHDB)
- Clé d’identification canadienne
- Publication : Le Coustumer P., Saint-Jean M., Detot G., Maugin E. (2025). Adoption of innovative Biocontrol in Horticulture: a French Survey. ISPIM Innovation Conference, Bergen.
